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La Notion des Objets Perdus



Les épaves terrestres et les objets abandonnés

 

 

Le prospecteur trouve une multitude d’objets divers. Ce chapitre ne s’applique qu’aux objets perdus ou abandonnés qui ne présentent aucun caractère historique ou archéologique. Quoi de commun entre une cartouche de chasse jetée à terre et une monnaie perdue sur la plage ? Ces objets, il faut le savoir, ont tous un statut juridique particulier qui conditionne leur attribution. N’oubliez pas ce principe fondamental : ce n’est pas parce que vous trouvez un objet, même anodin, que vous en êtes propriétaire aux yeux de la loi. Certaines règles simples doivent être connues. La première concerne la distinction entre l’objet perdu, qu’on appelle une « épave » et l’objet abandonné (A). Les épaves sont soumises à un régime très particulier en particulier de déclaration (B

A) Distinction entre l’objet abandonné et épave.

 

L’objet abandonné, par définition, n’a pas été égaré (à la différence de l’épave) par son propriétaire qui, par cet abandon, a manifesté son intention d’en laisser la propriété au premier occupant. Cet objet (comme une tirette de boisson, une capsule, un plomb...) appartient donc sans délai à la personne qui l’a découvert puisque l’Etat n’exerce aucun droit particulier sur ces objets. Sauf que l’abandon ne se présume pas. Aussi, ce sera au prospecteur, en cas de conflit avec le propriétaire de l’objet, de prouver qu’il avait l’intention d’abandonner.

 

A la différence de la chose abandonnée, l’épave (qui peut être maritime, fluviale ou terrestre) est un bien - meuble - (le bien meuble étant tout bien pouvant être déplacé) dont le propriétaire n’a perdu que la possession mais il n’a pas entendu renoncer à son droit de propriété. Juridiquement, le bien perdu appartient donc toujours à son propriétaire initial. Donc, celui qui le trouve n’en devient pas le propriétaire.

 

L’épave terrestre n’est pas nécessairement trouvée à la surface de la terre. Si l’objet est enfoui dans le sable ou la terre, il doit être considéré comme une épave (sauf s’il a été enfoui volontairement et, dans ce cas, ce peut être un trésor). Tout ce qui n’est ni épave maritime ni épave fluviale est une épave terrestre (sur la définition des épaves maritimes et fluviales).

 

On s’aperçoit que les découvertes de prospecteurs sont surtout constituées d’épaves terrestres : ainsi les objets trouvés dans les cours d’eau ni navigables ni flottables sont des épaves terrestres, ou encore les objets trouvés sur les plages (bijoux récents, pièces de monnaie... ), et bien sûr, tous les objets découverts sous ou sur la terre ferme ( sauf l’hypothèse du trésor ).

 

Il est donc primordial de savoir si l’objet que vous venez de trouver a été égaré ou au contraire volontairement abandonné. Pour le savoir, la méthode est simple : on considère que si la chose trouvée présente quelque valeur, on doit présumer la perte plutôt que l’abandon. Ce qui signifie que l’objet ayant quelque valeur sera qualifié d’épave. Tel est le cas pour les bijoux, les pièces de monnaie, montres, clés, lunettes.... S’agissant d’une présomption de perte, le découvreur peut établir que l’objet a été volontairement abandonné mais cette preuve est difficile à rapporter en la matière. En effet, comment prouver par exemple qu’un bijoux a été abandonné et non perdu ? A l’inverse, les objets qui ne présentent que peu de valeur commerciale sont considérés comme abandonnés (capsules, tirettes, douilles, déchets divers...).

 

Ainsi différenciés, l’épave et l’objet abandonné présentent des régimes très différents d’attribution.

 

L’objet abandonné, qui n’a généralement pas de valeur, appartient immédiatement à la personne l’ayant découvert. Si vous récupérez des plombs, ceux-ci vous appartiennent sans difficulté. Même remarque si vous trouvez des armes qui ont été visiblement abandonnées et non volontairement cachées ou perdues etc...

 

L’épave, donc l’objet perdu, n’appartient pas à son découvreur, bien au contraire, et doit souvent être déclarée. De la réalisation de cette condition, plusieurs conséquences en découlent.

B) La déclaration et l’attribution des épaves terrestres.

 

L’administration, en vertu de ses pouvoirs de police, a été souvent amenée à intervenir dans l’attribution des épaves terrestres, en exigeant soit la simple déclaration soit le dépôt des épaves. Il n’existe pas de loi régissant les objets trouvés mais uniquement des règlements locaux. En effet, la plupart des municipalités ont instauré dans les mairies ou dans les commissariats de police des bureaux des objets trouvés et imposent aux inventeurs l’obligation d’au moins y déclarer leurs trouvailles si ce n’est d’y déposer les objets. Il appartient à chaque prospecteur de se renseigner auprès des mairies (ou des commissariats) afin de savoir si un tel règlement existe et d’en connaître les modalités d’application.

 

Sur le plan juridique, l’inventeur (c’est à dire le découvreur) d’une épave est considérée comme de mauvaise foi. Cette mauvaise foi ne signifie pas que le prospecteur est malhonnêteté mais simplement qu’il ne peut ignorer que l’objet a été perdu par son propriétaire et qu’il ne peut pas se considérer comme le propriétaire.

 

Ainsi, si vous trouvez un objet présentant quelque valeur (montre, bijou etc...) vous n’en n’êtes pas le propriétaire instantanément car vous êtes considéré comme un possesseur de mauvaise foi.

 

Quand vous déclarez l’épave terrestre, deux situations peuvent se présenter : soit le règlement municipal vous oblige à déposer l’objet, soit vous n’êtes tenu qu’à le déclarer. Si vous le laisser en dépôt, il est bien entendu nécessaire d’exiger un reçu en bonne et due forme qui comporte une description de l’objet. A noter que le fait de se voir remettre l’objet un an et un jour après la découverte n’a aucune influence sur la propriété de l’objet. Le découvreur n’en devient pas pour autant propriétaire passé ce délai. Pendant toute la durée légale de possession de l’objet par l’inventeur, le véritable propriétaire a la possibilité de le réclamer sous réserve qu’il apporte la preuve de son droit de propriété sur l’objet. Ceci requiert des signes caractéristiques sur l’objet.

 

Pour devenir réellement propriétaire d’une épave, il faudra attendre... Deux délais existent dans notre droit pour acquérir l’objet par écoulement du temps : 3 ans ou 30 ans. Aujourd’hui, une divergence perdure quant à l’application de l’un ou l’autre de ces délais.

 

- Pour certains auteurs, l’inventeur qui a déclaré l’objet trouvé, conformément à un arrêté municipal, doit être récompensé de son sens civique et devenir propriétaire à l’expiration du délai de trois ans à compter du jour de la perte (comme ce jour n’est pas toujours évident à déterminer, on peut prendre comme point de départ le jour de la déclaration). Au contraire, l’inventeur qui, tenu par le règlement municipal, n’a pas effectué la déclaration ne devient propriétaire qu’au bout de trente ans à compter de son entrée en possession !

 

- Pour une autre partie de la doctrine, l’inventeur ne devient effectivement propriétaire qu’au bout de trente ans qu’il ait effectué la déclaration ou pas.

 

S’il est difficile de se faire une idée précise au sein de cette polémique, une chose doit être retenue : toute épave terrestre trouvée comportant des signes caractéristiques ( blason, nom, date etc... ) permettant sa reconnaissance et son identification doit être déclarée si un règlement municipal l’exige ( ce qui est très souvent le cas ). Le prospecteur qui n’effectue pas cette démarche encourt des poursuites pour vol. Même en l’absence de tout règlement, l’honnêteté recommande d’effectuer un minimum de démarches pour retrouver le propriétaire d’un objet identifiable. Il suffit de penser au propriétaire malheureux pour qui l’objet perdu représentait une valeur affective pour adopter une attitude civique.

 

Si aucun règlement n’impose une déclaration administrative (ce qui est très rare), l’inventeur ne peut légalement devenir propriétaire qu’au bout de trente ans.

 

Le découvreur peut céder, vendre... l’objet à un tiers alors qu’il n’en est pas le propriétaire. Deux cas sont distingués : si le tiers ne connaît pas l’origine de l’objet  ( c’est à dire qu’il ignore que l’objet a été trouvé ), il est de bonne foi et est protégé par un article du Code civil ( l’article 2279 alinéa 2 du Code civil ) qui n’autorise la revendication par le véritable propriétaire contre lui que pendant trois ans. A l’inverse, si le tiers connaît ( ou ne pouvait ignorer ) l’origine de l’objet, il est de mauvaise foi et le véritable propriétaire peut revendiquer l’objet entre ces mains pendant trente ans. Le prospecteur qui s’est débarrassé de l’objet risque en outre une condamnation à des dommages et intérêts.

 

Dans l’hypothèse où le propriétaire revendiquerait l’objet dans les délais, le découvreur n’est pas privé de toute indemnité. D’une part, la promesse d’une récompense faite publiquement par la personne qui a perdu un objet a force. D’autre part, en l’absence de toute promesse, une indemnité peut être due à l’inventeur pour sa peine et ses frais.

 

Tout ce qui précède ne concerne que le domaine public. Concernant les objets égarés dans un lieu privé non ouverts au public, ils sont réputés appartenir à celui qui habite les lieux. L’habitant des lieux est présumé vis à vis de la loi en être le légitime propriétaire. Le prospecteur ne peut donc réclamer la propriété des objets que s’il a convenu d’un accord avec le propriétaire du terrain. Le plus simple consiste à rédiger un accord écrit préalable réglant la question de l’attribution des objets.

 

 

                                                                                  Antoine BEGUIN